CINQ CHOSES QUE J’AURAIS AIMÉ SAVOIR COMME JEUNE AVOCATE

Comité Question de genre

J’ai eu la chance d’assister à la conférence de l’Association du Barreau canadien, Division du Québec « Cinq choses que j’aurais aimé savoir comme jeune avocate », une initiative du Forum des femmes juristes.

UN PETIT MOT SUR …LE FORUM DES FEMMES JURISTES

Le Forum des femmes juristes de l’Association du Barreau canadien, Division du Québec, regroupe les femmes juristes, qu’elles soient avocates, notaires, juges, étudiantes en droit ou professeures, afin de promouvoir les intérêts spécifiques des femmes dans la profession. En tant que professionnelles du droit et femmes, les avocates sont les gardiennes des intérêts et des droits des femmes à l’échelle de la société québécoise. Le Forum se veut aussi un lieu d’échange d’idées et d’information ainsi que de réseautage.

Source : http://abcqc.qc.ca/Sections/Forum-des-femmes-juristes

Le 1er mars 2017, sous la forme conviviale d’une table ronde, deux avocates en pratique privée ont partagé leur expérience et prodigué des conseils aux jeunes étudiantes et avocates présentes. Me Cara Cameron de chez Davies et Me Marie-Hélène Jolicoeur de chez Lavery Montréal ont été généreuses, honnêtes et sans tabou durant les deux heures qu’a duré la rencontre.

Dans le cadre des activités du comité Question de genre, je vous présente un petit résumé de tous les conseils et anecdotes qui m’ont marqués et touchés durant la rencontre.

1. CONCILIATION TRAVAIL-FAMILLE

C’est, sans surprise, la préoccupation qui revient le plus souvent chez les étudiantes. Les femmes peuvent-elles avoir une famille et maintenir un bon rythme de travail ? Vont-elles perdre des dossiers, des clients ? Me Cameron et Jolicoeur nous ont rassuré : le mot d’ordre Équipe.

Aussi simple que cela puisse paraître, le soutien du conjoint ou de la conjointe est primordial. Pour réussir la routine quotidienne, il faut fonctionner en équipe. Les partenaires doivent être égaux et partager la même vision de l’éducation. Et c’est possible de conjuguer sa vie professionnelle avec sa vie personnelle, en les gérant ensemble, de façon globale.  Un bon exemple : un client a des enfants ? Pourquoi ne pas les inviter à aller voir un spectacle de Disney on Ice avec vos propres enfants ? Votre conjoint est ingénieur ? Invitez-le quand même à un 5 à 7, avec des clients qui travaillent pour une compagnie de construction.

Surtout, il faut définir vos priorités et votre idée de « succès ». Un exemple : pour vous, il est hors de question de manquer les rendez-vous médicaux, les concerts de piano et la période des devoirs. À l’inverse, il est plus important pour votre conjoint de faire les lunchs, d’aller chercher les enfants après l’école et d’assister aux compétitions de natation. Bingo ! Les tâches sont ainsi partagées et réalisables. Exit la wonder-woman qui fait tout : si toutes les tâches sur votre liste à vous sont remplies, on peut parler d’un succès ! 

2. VIE PERSONNELLE

Le plus important, selon les deux avocates, c’est d’avoir une vie pleine et satisfaisante. Faites du sport, ayez des hobbies, planifiez des sorties et surtout, ayez des amis en dehors de votre cercle de travail. Définissez ce qui vous rend heureux/heureuse et faites de la place dans votre vie pour ça. Si vous n’accordez pas dès le début une importance primordiale à cet élément de votre vie, vous ne le ferez jamais.

3. RELATIONS AVEC LES COLLÈGUES

La première chose à faire, c’est de s’impliquer dans les politiques internes du bureau. Qui a de l’influence ? Pourquoi ? Quelles sont les valeurs qui sont véhiculées ? Pour avoir l’ambition d’être un leader, il faut savoir comment se joue le jeu pour y participer.

Surtout, il faut être capable de « s’auto-promouvoir ». Les femmes, en particulier, ont tendance à ne pas vouloir se mettre trop de l’avant, selon les observations des avocates. Il ne faut pas attendre ! Foncez et n’ayez pas peur de promouvoir vos réussites (dans l’humilité, bien sûr), pour vous faire respecter de vos collègues et peut-être même devenir une personne-ressource.

4. RELATIONS AVEC LES CLIENTS

En tant que femme, est-ce difficile de garder sa crédibilité auprès de clients masculins ? Que faire si l’on se retrouve face à une situation délicate ? Le but, c’est d’être toujours polie, mais de rappeler au client le cadre professionnel de votre relation. Mettre une distance, ne rien prendre personnel, se respecter et « garder son cool ». Surtout, il faut faire attention à son approche et aux sujets abordés, parce que la ligne peut être mince entre le flirt et la persuasion. Le truc de Me Cameron et Me Jolicoeur : l’humour !

5. DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL

Une phrase lancée par Me Cameron qui me servira personnellement de devise personnelle : « Begin as you mean to go on ». Dès l’été étudiant, dès les premières semaines de stage, il faut faire sa place et gagner la confiance de ses pairs et patrons. Me Jolicoeur nous propose des actions concrètes : aller luncher avec des collègues, proposer des activités, avoir un mentor, s’impliquer dans des causes ou des conseils d’administration, proposer des améliorations etc. Il faut démontrer qu’on s’intéresse au bureau et aux personnes qui y travaillent. Et il n’est jamais trop tôt pour commencer.

LE MOT DE LA FIN

Un récent article paru dans Droit Inc (que vous pourrez retrouver sur la page Facebook de Question de genre) confirme la dure réalité des femmes en pratique privée : seulement 15% des associés dans les bureaux sont des femmes. Présentement, nous sommes 75% d’étudiantes sur les bancs d’école. Le changement se construit maintenant, à l’instant où vous lisez ces lignes ! Le futur nous appartient, mais c’est à nous de le prendre en main. 

Charlotte Reid, pour le comité Question de genre.

 

RENCONTRE AVEC MME SOPHIE D’AMOURS, CANDIDATE AU POSTE DE RECTRICE

Comité Question de genre

À l’occasion de l’élection au rectorat 2017, le comité a rencontré Mme Sophie D’Amours. Celle-ci est présentement professeure titulaire pour le département de génie mécanique de l’Université Laval et elle se porte candidate au poste de recteur. Le comité a profité de l’occasion pour lui poser quelques questions et discuter de la place de la femme dans la société.

Tout d’abord, elle adopte une attitude téméraire afin de faire sa place dans le processus. Mme D’Amours a pris le temps de bien nous expliquer qu’elle essaie d’incarner par ce qu’elle est, ce que la femme mériterait d’avoir. Elle soutient qu’il n’est pas toujours facile de le faire, que ça demande d’ouvrir plusieurs portes et qu’il arrive parfois que la femme doive faire des choses que les hommes n’ont peut-être pas à faire. Selon elle, les femmes ont parfois été hésitantes, en particulier en raison de leur conception de ce que les dirigeants pensaient de la femme alors que ce n’était pas toujours juste. Elle a affirmé que la génération d’aujourd’hui choisit de plus en plus en fonction du jugement et des qualités de la personne et qu’il faut avoir confiance en ces aspects. Elle a alors proposé une solution pour pallier à cette hésitation. Elle a soutenu que l’on a la responsabilité de donner des espaces pour préparer la relève féminine. Elle affirme que le talent se trouve, mais surtout qu’il se prépare. Dans le même ordre d’idées, elle a su démontrer une position d’ouverture face à la génération d’aujourd’hui. Elle croit en la diversité de genre, de culture et de générations. Elle soutient qu’il faut encourager les organisations à en tenir compte davantage pour en ressortir gagnant.

Par ailleurs, elle soutient qu’il est important de se poser certaines questions face à une situation qui nous touche; est-ce que la situation est normale et est-ce que c’est normal que celle-ci se répète? Selon elle, face aux iniquités sociétales, il faut savoir défendre nos positions et miser sur la communication. Par la communication, il serait ainsi possible de faciliter les relations.

En outre, par rapport à l’élection au rectorat, elle ne croit pas être désavantagée en raison de son sexe. Elle est persuadée que la communauté cherchera à élire la meilleure personne avec le meilleur talent pour régir l’Université. Elle assure que l’Institution est très rigoureuse dans son processus et que ce sera le talent et la personnalité de la personne qui fera pencher la balance.

Pour sa part, elle dit bien assumer sa féminité. Entre autres, elle affirme qu’il existe plusieurs biais concernant les différences entre les générations, les cultures, les genres et qu’il faut davantage de personnes qui se présentent à ce type de concours pour contrer ces biais. Elle a en été témoin dans son secteur majoritairement masculin. Elle a su comprendre les biais, les vivre et elle soutient qu’il est nécessaire de les déconstruire pour le bien de la collectivité comme elle le fait en assumant sa féminité. Notamment, elle soutient qu’il faut s’opposer au fait que l’on ne recrute pas une femme, car celle-ci peut être enceinte.

Elle a affirmé que la société a besoin de familles qui se développent et qu’il est inacceptable de ne pas donner la chance à quelqu’un d’avoir une carrière professionnelle en même temps qu’une famille.

Selon elle, c’est une posture sociale importante que le Québec doit adopter. Il faut prendre en compte que lorsque l’on engage quelqu’un, c’est pour le long terme et que le fait qu’une personne se consacre à sa famille pendant un moment ne changera rien à cette perspective. Elle est consciente qu’il s’agit parfois d’un défi logistique pour les employeurs. Toutefois, elle soutient que si l’on ne change pas, on aura moins d’enfants et qu’ainsi il y aura moins de femmes qui travaillent et la diversité qui fait la richesse d’une société s’en retrouvera réduite. Finalement, elle est optimiste face à l’avenir. Elle est persuadée que la solution se trouve dans les rapports entre les hommes et les femmes et que c’est de cette manière que la famille aura la capacité de s’épanouir et de former la diversité souhaitable pour l’avenir.

Le comité souhaite vous rappeler que l’élection au rectorat aura lieu de 26 avril prochain et que toutes les informations se retrouvent sur le site web de l’Université. Voici le lien pour la description des candidats et leur plateforme électorale respective.

https://www.lefil.ulaval.ca/election-rectorat-2017-3-candidats-course/

 

Élodie Drolet, Élisabeth Maheux, Charlotte Reid, Odélie Beaurivage Godbout et Camille Dupont

RÉALITÉ JURIDIQUE AU BRÉSIL

Comité Question de genre

Le comité Question de genre a rencontré une avocate brésilienne afin de discuter de la réalité
juridique des femmes dans son pays. Me
Amanda Neuenfeld Pegoraro est récemment diplômée en droit ; elle poursuit d’ailleurs ses études.

De nombreuses problématiques ont été présentées lors de cette rencontre. En effet, on y apprend que les droits entre les hommes et les femmes sont différents dans le milieu juridique. Pour un même travail, il y a rarement un salaire équitablement défini. L'avocate nous explique que les cabinets brésiliens privés s’inquiètent peu de fournir un traitement impartial à leurs employés selon leur sexe. Ce n’est que dans les multinationales qu’une femme n’a pas à s’inquiéter de la valeur de son salaire. On apprend aussi que les hommes ont un accès beaucoup plus évident au réseautage que les femmes grâce au soccer. En effet, la réalité du pays fait en sorte qu’ils participent plus facilement à ce genre d’activités sociales, leur fournissant ainsi une opportunité de rencontre. De plus, il n’est pas rare qu’une jeune avocate soit moins reconnue dans son travail à cause des idées préconçues circulant dans la société brésilienne que Me Amanda Neuenfeld Pegoraro nous décrit comme une « culture machiste de l’homme guerrier ». Pour un même travail, une avocate ne recevra pas la même crédibilité. Ainsi, pour un homme, trouver un travail dans le domaine juridique, même sans spécialisation, est beaucoup plus évident que pour une femme.

Par rapport à la situation juridique québécoise, on peut y observer de nombreux ponts de comparaison. Les enjeux sont souvent les mêmes pour les jeunes juristes. On pense immédiatement à l’iniquité salariale, mais il y a aussi, par exemple, l’aspect du congé de maternité. Autant au Québec qu’au Brésil, les employeurs rechignent lorsqu’une avocate souhaite prendre congé pour ses enfants, la situation se produit d’ailleurs en amont lorsqu’on hésite à engager une femme, car on croit qu’elle coûtera plus cher qu’un homme pour le cabinet.

Les jeunes femmes nouvellement diplômées dans le domaine juridique ont aussi beaucoup de difficulté à percer. Il faut aussi savoir que, comme au Québec, c’est lors de l’entrée sur le marché du travail que les femmes vivent des difficultés discriminatoires en raison de leur sexe et non pendant leur scolarité. Toutefois, comme nous l’explique Me Amanda Neuenfeld Pegoraro, le Brésil n’a pas développé les mêmes solutions à ces problématiques.

Depuis quelques temps, un regroupement d’avocates détenant plus d’expérience et déjà bien installées dans des bureaux ont lancé un programme de mentorat afin de soutenir les avocates débutant dans le domaine. Il s’agit de Women in Law Mentoring Brazil. Ce ralliement permet notamment l’entraide et le réseautage. Il est possible de demander conseil à une avocate d’expérience sur une situation vécue au travail. Cela aide les jeunes femmes en début de carrière en leur offrant des outils accessibles.

Lors des rencontres de mentorat, on peut exposer aux débutantes les petites actions qu’elles peuvent faire afin de confronter plus facilement la discrimination. La juriste nous donne l’exemple de ne pas montrer son insécurité au travers de sa posture et de comment laisser transparaître nos efforts dans le but de prendre sa place.

« Les mentors tentent de développer l’idée de force et de résilience chez les jeunes juristes. »

Me Amanda Neuenfeld Pegoraro que nous avons rencontrée spécifie d’ailleurs qu’un tel programme de mentorat auprès des jeunes avocates existe aussi au Mexique. Au Québec, nous avons beaucoup d’activités de réseautage et de séances d’information orchestrées par les facultés et de nombreux comités. Toutefois, aucun support ne se poursuit lorsque les jeunes femmes quittent le milieu scolaire pour entrer dans le domaine juridique. Peut-être qu’une combinaison de ces services serait la clef pour un avancement dans les avantages sociaux des jeunes juristes?

 

Élodie Drolet, Élisabeth Maheux, Charlotte Reid, Odélie Beaurivage Godbout et Camille Dupont