LE VERDICT

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La « Taxe Netflix »

November 11, 2017 by Le Verdict

Le 28 septembre dernier, la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, a annoncé la «nouvelle politique culturelle canadienne », après plusieurs mois de consultations publiques. Une longue liste de mesures au menu : un investissement de 160 millions$ sur 5 ans pour la toute première stratégie d’exportation de contenu canadien afin de renforcer la présence canadienne à l’international. Une contribution du gouvernement afin de maintenir à flot le Fonds des médias du Canada qui souffre d’une diminution continuelle de son financement.  L’injection de 1,26 milliard de dollars dans le Fonds stratégique pour l’innovation pour les secteurs industriels et technologiques ainsi que la création d’une filiale canadienne de Netflix pour la création de contenu assortie d’un investissement de 500 millions de dollars en contenue indéterminé, et d’un autre 25 millions de dollars en contenu francophone. De dernier montant ne représente à peine 5% de l’investissement total, sans autre forme de garantie  
 
 
de contenu francophone, ni canadien d’ailleurs. Par contre, toutes ces nouvelles ont été globalement éclipsées, avant même la présentation publique de la nouvelle politique culturelle, par l’annonce que le gouvernement n’entendait pas réformer l’encadrement législatif et ainsi imposer à Netflix, ainsi qu’à tous les autres géants du web qui exportent des produits et services intangibles et qui n’ont pas de siège social au Canada, le prélèvement des taxes sur les produits et services que sont la TPS (fédéral) et la TVP (provincial). Dans les faits, ces produits et services intangibles sont taxables, mais sur une base volontaire des consommateurs qui doivent remplir un formulaire afin de payer les taxes. Évidemment, la participation citoyenne est anémique à ce niveau… 
 
Manque à gagner Une telle décision est absolument aberrante à deux niveaux. D’abord parce que le Canada et les provinces se privent de plusieurs millions de dollars en  revenus supplémentaires à chaque année. Avec une base d’abonnés canadiens dépassant les 5 millions, ce sont près de 100 millions $ de taxes qui ne sont pas prélevés au Canada. À l’heure où le gouvernement canadien annonce des déficits astronomiques, et qu’il travaille sur une réforme fiscale très controversée qui semble viser directement les PME canadiennes et la classe moyenne, il est difficile de se demander pourquoi le Canada continue de se priver de telles sommes, pourtant beaucoup plus faciles à recueillir, et semant nettement moins la polémique. De plus, quand la ministre Joly justifie sa décision par le désir de ne pas augmenter le fardeau financier des canadiens, difficile de ne pas y voir de l’hypocrisie crasse et un mensonge éhonté. Hypocrisie d’abord parce qu’on ne peut donner d’une main et reprendre de l’autre, comme prévoit le faire le gouvernement. Mensonge ensuite parce que la fameuse « taxe Netflix » n’est pas une nouvelle taxe, il s’agit ni plus ni moins des deux mêmes taxes sur les produits et services que les canadiens sont habitués de voir au bas de leur facture depuis des décennies, et qui est déjà applicable sur les produits et services offerts par des compagnies sises au Canada.      

 
Iniquité fiscale Ce qui m’amène à la deuxième aberration : l’inévitable iniquité fiscale que cela entraîne. Iniquité parce que les « géants québécois » que sont CraveTV, Club Illico ou encore Tou.tv, qui offrent des services d’écoute en ligne de façon continue (streaming), doivent prélever les taxes sur leurs services; ce qui favorise nettement les grandes multinationales au détriment des joueurs locaux, et obligatoirement plus petits. Iniquité d’ailleurs fortement décriée par Peter Simons, PDG de la maison Simons, lors de son passage à la populaire émission Tout le monde en parle le dimanche 8 octobre. De plus, le déplacement des Canadiens vers des services en ligne, marché dominé par les joueurs qui bénéficient de l’extraterritorialité de leur siège social, entraîne une perte de revenus pour les fournisseurs québécois, ce qui se traduit également par une baisse corrélative de leur participation aux différents fonds canadiens dédiés aux médias et à la culture; ce qui force le gouvernement canadien à investir directement
dans ces fonds autrefois autofinancé – ce qu’il fera d’ailleurs, tel qu’annoncé par la ministre Joly. Or, le gouvernement aurait très bien pu imposer le prélèvement des taxes par Netflix et autres, et dédier ces sommes à ces fonds, au lieu de devoir sortir de l’argent « neuf », encore une fois. 
 
Combat impossible ? Mélanie Joly a déjà déclaré qu’il était impossible de taxer Netflix parce qu’il n’avait pas de siège social au Canada. Vraiment !? C’est probablement pour cette raison que l’Australie, le dernier en date, et 15 autres pays ont réussi à le faire jusqu’à présent… Le gouvernement canadien a choisi de négocier la culture canadienne à la pièce avec les joueurs les plus influents, ceux qui ont les moyens de s’acheter une place à la table des négociations, et sans même que ne leur soit imposé d’obligations en matière de contenu. La ministre Joly a déjà fait savoir qu’elle entend négocier des ententes à la Netflix avec Amazon et Facebook, notamment, alors que l’entente avec Netflix n’a toujours pas été rendue publique et que le gouvernement n’entend pas le faire. Selon le Conseil du patronat du Québec, le gouvernement Trudeau « fait malheureusement preuve d’un laxisme et d’une apathie des plus choquants » en mettant en avant « un concept d’équité à géométrie variable et selon des objectifs opaques ». Il est également à noter que Netflix ne paie pas non plus d’impôt au Canada puisque tous les revenus sont perçus aux États Unis, y compris ceux provenant d’abonnés canadiens. Et, au risque de vous décevoir, l’annonce d’un Netflix Canada ne changera pas la donne. En effet, il ne s’agira ici que d’une maison de production, qui n’engendrera que des dépenses pour sa maison-mère, alors que les revenus seront probablement encore tous perçus aux États-Unis, maison de production qui pourra fort probablement profiter en plus des subventions destinées à la production de contenu canadien, alors qu’elle ne contribuera aucunement au financement des fonds. Il y a de quoi être indigné ! Heureusement, le gouvernement du Québec a déjà fait valoir son intention de taxer Netflix, et l’a réitéré, en plus de recevoir l’aval de la ministre Joly elle-même, qui vraisemblablement n’entend pas remettre en question son «aplaventrisme» devant les multinationales, au détriment des intérêts des Canadiens. Une motion unanime a également été déposée à l’Assemblée nationale du Québec réclamant l’équité fiscale pour toutes les plateformes numériques. C’est la voie à suivre: il ne reste plus qu’à espérer que les actions suivront les mots…

November 11, 2017 /Le Verdict
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