L’apathie gouvernementale, la vraie menace
Par William Gaudreault
DOSSIER CLIMAT | « Nous sommes au début d’une extinction de masse et tout ce dont vous pouvez parler, c’est d’argent et de contes de fées de croissance économique éternelle. Comment osez-vous ? », disait Greta Thunberg en septembre dernier aux quelques dirigeants présents au décevant Sommet sur le climat.
Rapidement, la jeune militante fut critiquée par ses innombrables détracteurs. On disait que son discours était alarmiste, exagéré, disproportionné, etc. Certains s’en sont même pris à son apparence, à sa différence… je ne nommerai aucun nom. Il reste que son discours fut le plus marquant depuis fort longtemps. Il s’agissait d’une expression la plus pure de la colère des jeunes d’aujourd’hui et des générations à venir…
Mais, bon, on n’a pas le droit d’être en colère, paraît-il. Toutes les expressions de colère et de mécontentement ne sont pas bien reçues, et ce, même devant une imminence de mort, car « il ne faut pas choquer ». Nous ne pouvons pas manifester, notre place étant à l’école, à apprendre comment « s’adapter » — et non le résoudre, comme auraient voulu répondre tous les étudiants du Québec dans leur examen ministériel — au dérèglement climatique, disait si bien le ministre de l’Environnement, Jean-François Roberge. On critique les jeunes par tous les fronts. On les traite d’alarmistes, de fous. On leur dit que c’est impossible de souffrir d’écoanxiété. On leur dit de « vivre leur vie de jeune » et de laisser le problème « aux adultes ». Regardez où cela nous a menés… Des jeunes intentent des poursuites contre les États pour atteinte au droit à la vie, manifestent dans les rues, agissent à la place des leaders, etc. Les jeunes agissent à la place des adultes.
Malgré une cascade de données alarmantes pouvant noyer le plus fervent des climatosceptiques — le rapport de 728 pages du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est un excellent exemple — les gouvernements réussissent à garder la tête hors de l’eau et à faire comme si de rien n’était. Attention, je ne dis pas que tous n’ont pas bu la tasse au moins une fois et n’ont pas réalisé l’ampleur du problème. Nous avons pris conscience du monde physique qui nous entoure et possédons une encyclopédie d’informations sur le monde qui nous entoure et les enjeux sur le climat. Tous les gouvernements ne sont pas restés les bras croisés, mais ils avancent à pas de tortue et Dieu sait si la tortue dépassera ce lièvre nommé « Crise climatique ». Pourquoi tant d’inaction de la part de nos leaders ? Pourquoi aucun geste n’est posé ? Pourquoi ne portent-ils pas attention à nos demandes ? Nous voulons vivre. Est-ce trop demandé ?
Le GIEC est catégorique : limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C pourrait faire la différence entre la vie et la mort pour bon nombre d’humains et d’écosystèmes dans les prochaines décennies. Les belles promesses et les mots vides de l’Accord de Paris ne suffisent plus. Cela nécessitera un virage à 180 degrés, virage que peu de gouvernements sont prêts à effectuer. « Ça coûtera trop cher », disent-ils, mais ils devraient savoir mieux que quiconque que l’argent ne se mange pas. « On ne veut rien brusquer », nous expliquent-ils, mais leur inaction nous brusquera inévitablement. Le virage sera brutal d’une manière ou d’une autre. Il faut changer radicalement de mode de vie, changer notre façon de manger, de nous déplacer, de nous construire et, surtout, de produire et de consommer de l’énergie, et cela, en peu de temps. Il faut — pour parler en bon québécois — « se virer sur un dix cennes ». Nous devons intervenir et faire bouger les choses. Nos gouvernements ne se réveilleront pas du jour au lendemain en lisant les rapports des experts. C’est la pression qui a toujours fait bouger le monde. Nos jours sont comptés. Nous avons le droit de vivre.