Élection du nouveau chef du parti québécois: Entrevue avec le président du PQ de l’Université Laval

Par Samuel Z. Castonguay

Paul St-Pierre Plamondon. Crédit : WikiCommons, Alexis G.

Paul St-Pierre Plamondon. Crédit : WikiCommons, Alexis G.

« Il faut obligatoirement arrêter de prendre le militant moyen pour un simple bénévole. » - Jonathan Carreiro-Benoit

ACTUALITÉS | Le 9 octobre dernier, quelques vingt-cinq mille membres et sympathisants du Parti Québécois se sont prononcés à l’occasion d’un important exercice démocratique visant à élire un chef à la formation politique en remplacement de Jean-François Lisée, démissionnaire après la cuisante défaite de 2018. À la suite d’une course à la direction qui fut longue car prolongée par la pandémie de COVID-19 – le nouveau chef devait initialement être connu le 19 juin –, mais néanmoins riche en idées et en débats, c’est l’avocat Paul St-Pierre Plamondon – communément surnommé PSPP – qui, gré d’une récolte de 56,02 % des voix au troisième tour du scrutin (1), remporta la palme, défaisant ainsi son plus proche rival, le député de Jonquière, Sylvain Gaudreault. Outre ces deux candidats, l’historien Frédéric Bastien et l’humoriste Guy Nantel croisèrent également le fer lors de ce marathon politique exclusivement masculin. Ils furent toutefois éliminés aux premiers tours.

 L’élection de M. St-Pierre Plamondon coïncide avec un moment charnière dans  l’histoire du Parti Québécois. Le goût amer de l’écrasante déconfiture au dernier scrutin  étant toujours bien présent dans la bouche de bon nombre de militants péquistes, c’est au  nouveau chef qu’incombe maintenant l’imposante tâche de mener la reconstruction du  vaisseau amiral du mouvement souverainiste à bon port. Il ne fait aucun doute que pareille  besogne ne peut se réaliser sans le dur labeur des militants, éparpillés dans les diverses  instances du parti.  

Le président du Parti Québécois de l’Université Laval, Jonathan Carreiro-Benoit, est revenu sur cette course lors d’un entretien inédit avec Le Verdict. 

Qu’avez-vous pensé de la course à la chefferie du Parti Québécois en général? 

La course fut divertissante sur plusieurs points. D’abord, les candidats ont radicalement  changé les stratégies classiques d’une course due à la pandémie. Cela a laissé place à de  multiples perspectives médiatiques, telles les rencontres virtuelles et les vidéos de  vulgarisation. D’autre part, la palette de candidats était très riche. Chacun mérite sa juste  part au sein du PQ. J’espère fortement voir messieurs Bastien et Nantel comme candidats  en 2022. 

Êtes-vous satisfait de la direction que prend le parti depuis le congrès extraordinaire  de Trois-Rivières en novembre 2019? 

Totalement. Pour y avoir participé moi-même, je peux vous garantir que le poids de ce  congrès extraordinaire se fait ressentir. Le nouveau chef incarne définitivement cette  direction. La jeunesse a parlé. Ce parti doit demeurer actif sur l’échiquier politique.  L’indépendance doit nécessairement rester une option de taille pour le Québec. Le tout  concorde parfaitement avec les sorties publiques du parti depuis l’élection de PSPP.  Néanmoins, je suis persuadé de l’efficacité de l’ancienne garde. On doit absolument  considérer les militants de la première heure dans notre calcul. Ils ont l’expérience qu’on  n’a pas forcément. 

Quel est le rôle des militants dans la refondation qu’a entamée le parti? 

Il faut obligatoirement arrêter de prendre le militant moyen pour un simple bénévole.  Depuis que je m'implique (2016), il y en a des belles et des pas mûres qui se sont faufilées  dans l’art du militantisme. Je crois que la refondation a mis les points sur les « i ». Prenons  l’exemple de l’association de l’Université Laval. Nous sommes plus d’une dizaine sur le  comité et je vous garantis que, sans la pandémie, nous serions certainement plus nombreux.  Notre rôle est d’influencer, mais également de prouver aux gens de tout horizon qu’il n’y  a rien de honteux à appartenir à l’une des plus belles familles politiques du Québec. La  cause qui nous porte est définitivement plus grande et noble que cette crainte non fondée de se faire regarder « croche » à la cafétéria. 

Plus précisément, quel est le rôle du Parti Québécois de l’Université Laval et de ses  jeunes militants? 

Pour rentrer dans les détails, le tout se constitue en trois paliers : manifester, argumenter et  recruter. Premièrement, il est primordial de faire valoir nos désaccords politiques lorsque  ceux-ci se manifestent. Il n’est pas normal que, dans une université à ce point ouverte sur  le monde, l’option indépendantiste soit autant marginalisée. Heureusement, la Semaine de  l’indépendance aide grandement à pallier cette injustice. Deuxièmement, il va  nécessairement y avoir des gens pour nous défier et argumenter contre nos idéologies.  L’université se veut un lieu d’échange intellectuel de bonne foi. Je m’attends de la part des  autres associations politiques à un dialogue dans les règles de l’art. Pourtant, c’est  l’administration elle-même qui pose régulièrement un problème. En effet, la quantité de  règles d’un non-sens majeur pour éviter les questions politiques sont, à mon avis, un frein  formel à la liberté d’expression. Finalement, après avoir établi notre rôle académique, il  faut que les gens se joignent à nous. Prouver les bienfaits de l’indépendance nationale n’est  pas difficile. Ce qui l’est, c’est d’éliminer une bonne fois pour tous les tabous qui y sont  associés.

En 2022, le Québec sera en élection générale. Quel est le plus grand défi qui attend le  parti, ses membres et son chef nouvellement élu, Paul St-Pierre Plamondon, selon vous? 

Ironiquement, je crois que le plus grand défi sera de maintenir la ligne du parti sur  l’indépendance. Depuis une bonne vingtaine d’années, le PQ a mis de côté sa raison d’être  pour devenir un parti politique à la PLQ ou à la CAQ, soit un parti de pouvoir et non de  rupture avec le statu quo. Maintenant, avec le congrès de Trois-Rivières et l’élection de  PSPP, il y a un certain retour aux sources. Je ne m’attends à rien de moins que cela. J’ai  réellement hâte de voter sur le plan de campagne. Il sera là le vrai test. 

En terminant, quel message aimeriez-vous adresser aux jeunes – les étudiants de  l’Université Laval, notamment – qui souhaitent s’implique en politique, et ce, peu  importe le parti? 

Comme on dit, chaque vote compte. De ce fait, chaque militant compte. Vous êtes l’avenir  de vos formations respectives. Croyez en vos capacités et foncez. La politique est à la  portée de tout le monde. Trouvez votre place et faites votre place. Personne ne peut avoir  la prétention de vous dire le contraire. Comme l’autre l’a si bien exprimé : « n’ayez pas  peur ». 


(1) PARTI QUÉBÉCOIS, « Le Parti Québécois a un nouveau chef! », 9 octobre 2020, https://pq.org/nouvelles/le-parti-quebecois-a-un-nouveau-chef-2/ (Consulté le 28 octobre 2020).