Nouveau code... nouveaux avocats?

Jeanne Larose
Rédactrice en chef

 

En ce début de session d’automne 2016, je tiens à vous souhaiter la bienvenue à la faculté, mais aussi, comme beaucoup d’entre vous le savez, dans une nouvelle ère du Code de procédure civile du Québec. Et oui, depuis janvier dernier, la procédure civile québécoise a fait un grand pas en avant par l’entrée en vigueur d’un tout nouveau code. Ça coûte cher de livres neufs, ça nous oblige à côtoyer les deux codes pour faire l’arrimage entre le passé et le présent, mais ce n’est pas tout. Le nouveau CPC crée un branle-bas de combat dans les professions juridiques qui gravitent autour des cours de justice, les obligeant à repenser leur façon de faire. L’idée essentielle qui s’en dégage ? Mettre le client au centre des priorités.

Le nouveau Code de procédure civile, en vigueur depuis le 1er janvier 2016

Encore trop souvent, des avocats plaideurs négligent d’être à l’écoute des besoins des clients qui réclament leurs services. Cette constatation fait suite à une étude réalisée par le professeur Jean-François Roberge en 2013-2014, soit pendant la période d’adoption du nouveau Code de procédure civile (CPC). Il est démontré que les clients recherchent une solution rapide à leur conflit pour limiter les coûts financiers et l’impact psychologique de la procédure.

Ils mettent aussi de l’avant certaines valeurs comme la confiance et la communication entre les parties, et ils aiment sentir qu’une justice équitable a été rendue. Leurs doléances ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd : le nouveau CPC met l’accent sur la coopération entre les parties, et donc, conséquemment, sur les conférences de règlement à l’amiable (les fameuses CRA).

Économiques et accessibles, elles désengorgent le système de justice québécois et apporte une réponse à un conflit dans de brefs délais. Évidemment, les CRA n’enchantent pas tout le monde. C’est bien là que les intérêts des clients viennent se heurter à ceux des avocats. La pratique des factures au taux horaire qui augmentent plus l’avocat travaille sur le dossier peut en inciter quelques-uns à allonger les procédures, ce qui n’inspire pas la confiance en la justice.

De plus, certains avocats axent leur stratégie vers un règlement qui rapportera plus financièrement, alors que le client souhaite davantage avoir la paix d’esprit, quitte à obtenir un montant plus bas. Il leur arrive aussi de voir les CRA comme un système de justice moindre, et de croire que seul un procès apporte une vraie solution de droit. L’étude montre que cette croyance n’est pas fondée, puisque le taux de satisfaction des CRA est de 83%. Devant ce dilemme, ce sont les avocats qui ont le gros bout du bâton.

Je suis persuadée que les avocats plaideurs ont le devoir de prioriser les besoins de leurs clients avant leurs bénéfices personnels. Il est grand temps de revoir le conflit, de ne plus le considérer comme un affrontement mais comme une négociation à la recherche d’un terrain d’entente entre les parties. Tout simplement parce que l’image des avocats au sein de la société en arrache. Les clients se lancent dans une procédure judiciaire comme on lance un hameçon à l’eau, pas trop sûrs de ce qu’ils vont pêcher, même avec le plus brillant et dispendieux des appâts.

Il n’en tient qu’à nous, futurs juristes, de redorer le blason de la profession d’avocat en gardant en tête les valeurs humaines qui nous animent. Et gagner la confiance du public, n’est-ce pas gagner une clientèle fidèle et satisfaite qui remplira les coffres des uns pour le plus grand bonheur des autres?