ME FLYNN, ARBITRE SPÉCIALISTE EN DROIT DU TRAVAIL
Marie-Philipe Lévesque
Avec un baccalauréat en Sciences politiques et une licence de droit de l’Université d’Ottawa, maître Maureen Flynn devient membre du Barreau du Québec en 1981. Aujourd’hui arbitre et médiatrice en droit du travail, elle nous explique son cheminement passé et sa pratique actuelle.
PARCOURS BIEN REMPLI
Avant d’être arbitre, Me Flynn évolue dans un parcours bien rempli qui débute par une pratique en cabinet privé en droit civil et commercial durant quelques années. Cependant, rapidement un changement professionnel se fait sentir.
De 1985 à 1988, l’avocate devient conseillère politique au cabinet du ministre du Travail de Pierre Paradis. Elle travaille alors à l’élaboration de projets de loi. « Il faut bien écouter les parties pour trouver un bon projet de loi », enseigne Me Flynn. Également, elle a l’occasion de travailler sur différents dossiers d’envergure, dont la réforme relative à la main-d’œuvre, dans l’industrie de la construction. « C’est ainsi que j’ai eu la piqûre pour les relations de travail », raconte la juriste.
En raison du passage en politique, il est plus difficile de trouver un emploi dans un cabinet privé. Alors, en 1988, la conseillère politique accepte de devenir directrice des relations de travail à l’Association des entrepreneurs en construction du Québec (AECQ), et ce, jusqu’en 1995. « Pour une femme, il y avait beaucoup de postes offerts en droit de la faillite, par exemple, mais pas en droit du travail, surtout pour le domaine de la construction », explique cette femme qui a su bien se démarquer dans un milieu compétitif.
« Ce fut une belle expérience sur le terrain, notamment pour les négociations », relate Me Flynn, maintenant connue dans le domaine. Durant son mandat à l’AECQ, sa formation d’avocate lui est utile, principalement pour comprendre les aspects légaux. « Cet emploi m’a fait voir les relations de travail sous un autre angle », confie l’arbitre. Tout cela l’amène à devenir consultante en relations du travail ainsi que pour la négociation de conventions collectives jusqu’en 2004.
C’est au tour du Conseil canadien des relations industrielles (CCRI), un tribunal quasi judiciaire, représentatif et indépendant qui veille entre autres à l’application du Code canadien du travail, de compter Maureen Flynn parmi ses rangs de 2000 à 2006. Elle est alors membre et vice-présidente à temps partiel. Cette expérience lui permet de concevoir des plans stratégiques et de contribuer à l’apaisement des différends, tout en développant de belles relations dans le milieu.
Ayant commencé une carrière d’arbitre et médiatrice de grief qu’on pourrait dire à temps partiel depuis 1995 au fédéral et au Québec depuis 2004, elle y consacre maintenant tout son temps. « Je ne me voyais plus pratiquer comme avocate-plaideuse. Je me suis alors dirigée vers une pratique moins partisane et plus neutre, bien que ce fut difficile de ne plus être avocate », admet la juriste.
AUJOURD’HUI ARBITRE
Aujourd’hui, Me Maureen Flynn est arbitre et médiatrice accréditée par l’Institut de médiation et d’arbitrage du Québec. Pouvant tenir une audience et rédiger autant en français qu’en anglais, on estime son nombre de décisions rendues à 329. Elle est également arbitre et médiatrice nommée au greffe de l’éducation, de la fonction publique, des chemins de fer du Canada ainsi qu’à celui de la santé.
Cependant, Me Flynn est surtout arbitre dans des dossiers relatifs au droit du travail. Comme
expliqué ci-haut, tout son cheminement au sein du cabinet du ministre du Travail, à l’Association des entrepreneurs en construction du Québec et au Conseil canadien des relations industrielles, en plus des activités de consultante en relation du travail lui permettent d’être bien connue des gens du milieu et considérée comme spécialiste par ceux-ci.
L’arbitre est considéré comme un juge privé, la plupart du temps sélectionné par les parties en
raison de ses qualifications et compétences dans le domaine visé. Les expériences d’emploi ou de projets réalisés dans le champ de droit sont très importantes puisque ce sont les accomplissements précédents qui permettent d’être reconnu comme expert, puis alors retenu comme arbitre.
« Les parties choisissent une personne qui leur semble spécialiste dans le domaine pour trancher leur litige, l’expérience est une donnée fondamentale », explique l’arbitre. « L’exercice en cabinet privé du droit dans le domaine est pertinent puisque l’arbitre connaît ainsi les us, les coutumes, puis les règles non écrites du secteur. Ce sont des normes que l’on ne peut savoir qu’avec une expérience terrain », ajoute-t-elle.
L’arbitrage prend la forme d’un tribunal privé et le droit positif s’applique, bien que ce soit d’une façon plus souple que devant les tribunaux réguliers de droit commun. Les grandes règles sont prévues dans les législations spécialisées en droit du travail et le Code de procédure civile constitue une référence, alors l’arbitre est encadrée. « Par contre, les parties peuvent établir leurs propres règles et elles ont avantage à le faire », précise Me Flynn.
« On ne peut pas parler d’arbitrage sans parler de médiation », s’exclame la juriste. En effet, de nos jours les modes alternatifs de prévention et de règlement de différends sont de plus en plus présents. « La médiation est rapide, efficace, moins coûteuse et permet aux parties d’adopter des solutions adaptées à leur conflit. Les parties en ressortent généralement enrichies », poursuit-elle. L’issue d’un litige peut prendre une forme plus créative qui est alors bien plus à la satisfaction des parties qu’un jugement imposé. « Le lendemain matin, elles travaillent ensemble, elles ont donc tout intérêt à maintenir de bonnes relations », ajoute l’arbitre.
D’ailleurs, la médiation est déjà plutôt bien développée dans le droit du travail. De plus, il est
important de mentionner que pour un même dossier, Me Flynn peut mettre son chapeau de
médiatrice et, si le litige ne se règle pas, elle peut ensuite enfiler son chapeau d’arbitre pour
trancher. Voilà la beauté de ces pratiques alternatives aux tribunaux de droit commun.
« L’avocat de demain devra être polyvalent, avoir une vision globale, être capable de faire des analyses complexes et favoriser les modes alternatifs de règlement de différends tel que la médiation », prévoit Me Maureen Flynn. Alors, celui ou celle qui souhaite devenir arbitre doit avoir ces forces, en plus d’avoir une réputation empreinte d’impartialité et d’équilibre. Évidemment, être membre du Barreau du Québec et se joindre à la Conférence des arbitres du
Québec, ou une organisation similaire, constituent des atouts.