LE PROGRÈS ENTRAÎNE-T-IL LA PARESSE ?
Émile Marcoux
Le progrès. L’innovation mène au progrès parce que l’ambition humaine parle contre la paresse. Nos possibilités semblent infinies, parce que l’innovation est le propre de l’intelligence humaine. Si je vous demande de peindre la paresse, vous dessinerez probablement les traits d’un être qui évite tous les efforts. Cependant, si je vous présentais le portrait d’une personne qui évite tous les efforts inutiles, y verriez-vous de la paresse ou de l’intelligence ?
L’innovation permet à l’être humain de faire plus avec moins. Pour s’en convaincre, il suffit de prendre l’exemple de l’outil. L’outil nous permet d’effectuer un même travail plus rapidement en fournissant un moindre effort. Ainsi, son introduction a entrainé une croissance de notre efficacité. Il en découle une augmentation de notre productivité et une diversification de nos activités. L’innovation entraine donc le progrès. Pour arguer qu’elle se conjugue à la paresse, encore faudrait-il en faire la preuve. En d’autres mots, démontrer que vous et moi nous ne retirons rien du gain d’efficacité qui découle de l’innovation. Qu’en est-il ?
Étudier l’effort consacré par l’homme du 20e siècle pour combler ses besoins primaires permettrait de répondre à cette question. Nous réaliserions que nous satisfaisons ces mêmes besoins avec beaucoup moins d’efforts aujourd’hui. Comparer l’effort que nos grands-parents mettaient au champ avec celui que nous mettons aujourd’hui sur les bancs d’école permettrait de constater que l’innovation n’entraîne pas la paresse. En effet, l’effort reste le même, il est simplement investi dans d’autres domaines. Ceci étant dit, puisqu’il s’agit d’un raisonnement purement cérébral, voire quelque peu endormant, procédons autrement.
Aujourd’hui, je vous annonce que dorénavant, grâce à une innovation X, 4 h de sommeil vous suffiront pour refaire le plein d’énergie. Réfléchissez. Qu’allez-vous faire des 4 heures qui s’ajoutent à votre journée active ? Rien ? Paresser ? Non. La plupart d’entre vous vont prendre un client de plus, certains vont sortir leurs souliers de course, alors que d’autres prendront ce temps pour le passer avec leurs enfants.
Le dernier siècle a été témoin de plus d’innovations que tous ceux qui l’ont précédé réunis. Nous avons fait des progrès inimaginables. Mais regardez les chiffres : regardez et vous verrez aussi que l’on travaille plus que jamais. Il n’existe donc aucun lien tangible entre la notion d’innovation et la paresse. Au contraire, enchaînés à nos ambitions qui sont nourries par l’innovation, ne sommes-nous pas rendus prisonniers du travail ? Où se trouve la limite entre l’actualisation de soi et l’obsession de la perfection ?
Quand vous y réfléchirez, gardez simplement en tête que l’innovation mène au progrès parce que l’ambition humaine parle contre la paresse.
Le dernier siècle a été témoin de plus d’innovations que tous ceux qui l’ont précédé réunis. Nous avons fait des progrès inimaginables. Mais regardez les chiffres : regardez et vous verrez aussi que l’on travaille plus que jamais. Il n’existe donc aucun lien tangible entre la notion d’innovation et la paresse. Au contraire, enchaînés à nos ambitions qui sont nourries par l’innovation, ne sommes-nous pas rendus prisonniers du travail ? Où se trouve la limite entre l’actualisation de soi et l’obsession de la perfection ?
Quand vous y réfléchirez, gardez simplement en tête que l’innovation mène au progrès parce que l’ambition humaine parle contre la paresse.
Pourquoi le sais-je ? Parce que cette idéologie du toujours plus est socialement valorisée. En fait, l’innovation se conjugue avec le progrès parce que l’idée de « toujours faire plus » est socialement construite, tout comme celle de « toujours faire mieux ».
L’idéologie du « toujours mieux » s’enracine dans notre société axée sur la performance. L’humain a ce fantasme de dominer son environnement ; ce besoin de se sentir à l’origine des choses pour éviter de subir. Donc, notre ambition guide l’innovation vers le progrès. Elle s’assure que l’on évite de tomber dans le confort de la paresse. Dès l’école primaire, on enseigne à nos enfants à identifier des pistes pour améliorer leur travail, sans égard au résultat obtenu. Le message est clair : « tu peux faire mieux ; tu pourras toujours faire mieux ». Pour prendre un exemple plus près de nous, pensons aux étudiants qui refont volontairement des cours déjà réussis dans le but d’obtenir de meilleurs résultats. Il s’agit d’une illustration concrète de cette quête de perfection dans sa dimension individuelle, cette chimère du « toujours mieux ». Chimère parce que l’innovation nourrit notre ambition d’atteindre l’inatteignable.
Le dernier siècle a été témoin de plus d’innovations que tous ceux qui l’ont précédé réunis. Nous avons fait des progrès inimaginables. Mais regardez les chiffres : regardez et vous verrez aussi que l’on travaille plus que jamais. Il n’existe donc aucun lien tangible entre la notion d’innovation et la paresse. Au contraire, enchaînés à nos ambitions qui sont nourries par l’innovation, ne sommes-nous pas rendus prisonniers du travail ? Où se trouve la limite entre l’actualisation de soi et l’obsession de la perfection ?
Quand vous y réfléchirez, gardez simplement en tête que l’innovation mène au progrès parce que l’ambition humaine parle contre la paresse.