À toi cher(e) étudiant(e) qui contemple la course aux stages. J’ai rédigé ce guide pratique en 7 points afin de t’assister dans ce processus chaotique et te réconforter : tu n’es pas obligé de suivre les règles pour réussir. Basé sur des faits vécus.
1. Honnêtement ne pas vouloir faire la course aux stages.
Jusqu’en décembre 2016, j’ignorais complètement ce qu’était la course aux stages. En fait, je ne savais même pas qu’il y avait un stage à effectuer au barreau (tsé quand tu l’as l’affaire). Je croyais que la course aux stages était mise en place par la faculté de droit dans le but d’obtenir un stage intéressant au baccalauréat (tel les stages à la magistrature). Je n’avais aucune idée que c’était l’équivalent de la course à la présidence américaine des facultés de droit. Je n’ai assisté à aucune conférence sur la course, en me convainquant que je recueillerais l’information nécessaire au moment opportun. Quand tous mes collègues se sont mis à en parler plus intensément, et que je vis leur niveau de stress augmenter par rapport à ce fameux stage, j’ai cru bon m’informer. En apprenant de quoi il s’agissait, ma réaction a simplement été : eh ben, pourquoi pas ? Au minimum j’acquerrai une expérience d’entrevue qui me sera sans aucun doute utile dans le futur.
2. Ne pas passer plus de 30 minutes à faire une lettre de présentation et un CV.
Le matin où la plateforme de dépôt en ligne ouvre, assoyez-vous devant votre ordinateur et rédigez votre lettre de présentation. Pas de modèle préfabriqué, pas de format général. Faites comme j’ai fait et assurez-vous que votre lettre de présentation soit exactement cela. Présentez-vous. Parlez de vous. Si vous êtes comme moi, c’est-à-dire une personne simple qui ne se complique pas la vie, votre texte ne sera même pas justifié, car c’est le genre de détail auquel vous ne porterez pas attention (une amie me l’a fait remarquer après la course, et apparemment ce n’est pas agréable à lire). Soyez francs et droit au but. Ma lettre comportait à peine 3 petits paragraphes rédigés dans un langage assez simple (voir le présent texte en exemple) dénombrant mes qualités essentielles, mais également mes défauts (les cabinets sauront donc exactement à quoi s’attendre s’ils décident de vous voir en entrevue).
3. Ne pas s’attendre à avoir d’appels.
En ne voulant pas nécessairement obtenir d’appel, vous êtes assurés de ne pas vivre de déception. Si simple n’est-ce pas ?! Voyez chaque étape comme un apprentissage, et si ça va plus loin : yé ! Sinon, meilleure chance la prochaine fois, l’univers ne tourne pas autour de la course aux stages. Il y a des stages et des emplois en dehors de la course.
4. Ne pas se préparer pour les entrevues.
Si vous avez franchi l’étape trois en recevant des appels pour une première entrevue, félicitations ! L’apprentissage se poursuit. Il est PRIMORDIAL, et je répète PRIMORDIAL de ne PAS se préparer pour les entrevues. Je sais, vous me direz que cela va à l’encontre de tous nos instincts. J’ai eu la chance d’avoir 4 premières entrevues qui ont été suivies de quatre 2es entrevues. Pourquoi ? Grâce à ma préparation inexistante. « Mon plus gros défaut ? Facile, je suis trop perfectionniste, je travaille trop fort, je m’investis trop dans mon travail… » BLA-BLA-BLA. Voulez-vous vraiment passer votre entrevue à répéter les mêmes choses que les 10 personnes avant vous ont déjà racontées ? Il faut se démarquer et le plus important c’est d’être authentique et fidèle à soi-même ! Pas de stress. Vous êtes là pour jaser. Vous êtes là pour vous présenter sous votre vrai jour, pas nécessairement votre meilleur. Quand on m’a demandé mon plus gros défaut : « Je suis entêtée comme ça n’a pas de bon sens, ce qui me rend assez impatiente parfois ». Quand on m’a demandé de quelle façon je compte appliquer mes aptitudes de leadership dans ma possible future pratique au cabinet : « Honnêtement, j’en ai aucune idée. Au jour le jour du mieux que je peux, j’imagine ». Tout le monde a des défauts. Personne ne sait tout. Dans un monde comme celui des avocats, qui peut souvent être hautain et coincé (faute d’utiliser l’autre mot auquel je pense, qui commence par « c » et fini par « onstipé »), c’est rafraîchissant de pouvoir discuter avec quelqu’un de franchement humble et terre-à-terre.
5. Se présenter habillé en cowboy (question de détendre l’atmosphère)
Aaaahhh…. Comment je m’habille ? Pour les messieurs, assez simples : complet, cravate et voilà ! Pour nous mesdames ? Pas aussi évident, surtout si comme moi vous ne prenez même pas le temps de mettre 2 bas pareil le matin. Lors d’une de mes premières entrevues, j’avais sans m’en rendre compte choisi les morceaux de mon ensemble séparément sans me demander de quoi ça pourrait bien avoir l’air en tant que tout. Je choisis une belle chemise blanche en tissu style lin, avec des poches en avant et bien rentrée dans mon pantalon ; pantalon propre couleur gris foncé qui fait étrangement penser à des jeans ; une ceinture pour accessoiriser (de cuire noire avec une boucle de métal démesurée), et puisque qu’il faisait méga tempête dehors, je troque mes talons hauts noirs habituels pour des bottillons de suède gris pâle avec frange à l’arrière qui me semblait très appropriés avant de quitter ma demeure. Imaginez ma réaction lorsque j’aperçus mon reflet dans une vitrine en arrivant au cabinet. Première réaction : « L’HORREUR, QU’AIS-JE FAIT !!! Je suis un cowboy ! » Deuxième réaction : «Bon si j’ai un appel pour une 2e entrevue, ça voudra dire que ma personnalité compense amplement pour mon manque de style ». En passant, j’ai eu une 2e entrevue à ce cabinet. Le but de cette anecdote est de remettre en évidence le principe général de ce guide : soyez vous-même, soyez transparents, et votre personnalité saura triompher sur vos choix vestimentaires (aussi horribles soient-ils).
6. Poser des questions lors des cocktails et laissez les autres faire la conversation.
Après 2 entrevues, j’ai maintenant un cocktail. De quoi je parle ? Il me semble que j’ai déjà tout dit… Petit truc que j’ai découvert : VOUS posez les questions et laissez les avocats répondre. « Pourquoi travailler ici ? Comment est l’atmosphère au cabinet ? ». De cette façon vous démontrez votre intérêt pour l’opinion de potentiels futures collègues tout en ayant amplement le temps de déguster les multiples bouchées et vins qui vous seront servis (ce n’est pas évident de manger et parler et disons-nous les vraies choses : food is life ).
7. Le matin des offres, se résigner à ne pas en recevoir le plus tôt possible.
Après avoir franchi toutes ces étapes, le fameux matin est arrivé. LE matin. Pas d’appel à 7h59 ? Résignez-vous immédiatement (voir étape #1, afin d’éviter toute déception). La course, la course, c’est pas une raison pour se faire mal !
Moral de ce guide : la course aux stages n’est pas la fin du monde, pas la fin de votre carrière. Il faut cesser d’idolâtrer ce procédé et ceux qui en ressortent gagnants. Chacun de vous trouvera sa place dans ce monde de fou qu’est la pratique du droit. Le fait que votre chemin ne passe pas par la course aux stages n’en diminue pas la valeur pour autant. Et si, dans ce processus, vous avez l’occasion comme moi de décrocher un stage inespéré dans un cabinet exceptionnel, avec de futurs collègues qui vous ressemblent en tous points, alors vous aurez peut-être réalisé, comme je l’ai fait et comme en témoigne ce guide, que l’honnêteté et l’authenticité sont des atouts payants qu’il serait sage de conserver tout au long de votre belle et prospère carrière.