Des mesures concrètes et non seulement des idées
Le 8 mars, journée internationale des droits des femmes, une date symbolique pour annoncer des pistes d’actions pour lutter contre les inégalités entre les femmes et les hommes.
En voici deux que je considère primordiales.
En finir avec les inégalités salariales
Au Québec, si le salaire des femmes continue d’augmenter au même rythme qu’à l’heure actuelle, celles-ci gagneront la même chose que les hommes en… 2060. Il y a loin de la coupe aux lèvres. Maigre consolation, le Québec s’en tire mieux que la moyenne mondiale. Cela prendra 217 ans avant d’atteindre l’équité salariale sur la planète selon le Forum économique mondial.
Néanmoins, le gouvernement québécois prend des mesures pour accélérer les choses. En vertu du projet de loi 10 présenté le 12 février 2019, les employeurs devront indemniser des milliers de travailleuses de façon rétroactive pour des écarts de salaire avec leurs collègues hommes. Ces ajustements visent tous les employeurs de dix employés ou plus au Québec, soit l’équivalent de 35 294 entreprises (34 555 privées et 739 des secteurs public et parapublic).
Ces changements découlent d’une décision rendue le 10 mai 2018 par la Cour suprême en faveur de syndicats québécois qui dénonçaient le régime en vigueur au Québec depuis 2009.
Selon le régime qui prévalait avec la Loi sur l’équité salariale, les employeurs devaient réviser, tous les cinq ans, l’équité salariale au sein de leur entreprise. Or dans les cas où ils découvraient des iniquités entre hommes et femmes, ils devaient les corriger, mais seulement dans le futur, sans dédommager les travailleuses pour les injustices subies au cours des années précédentes.
Dans sa décision, la Cour suprême avait jugé que ce régime portait atteinte au droit constitutionnel à l’égalité des femmes soit au droit à l’égalité garanti par l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.
La gouvernance au féminin.
Le Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD) a déposé, le 5 mars dernier, un manifeste en faveur de la représentation paritaire des femmes et des hommes dans la réforme du mode de scrutin au Québec.
Avec les élections du 1er octobre 2018, le Québec a rattrapé un retard historique. Alors que le taux de représentation féminine parmi les députés oscillait autour de la barre de 30 %, les efforts des partis ont permis d’accroître cette proportion à 42,4 %, juste au-dessus du plancher de la zone de parité 40/60. Toutefois, rien ne garantit que ces résultats soient permanents.
Actuellement, le Québec compte 125 circonscriptions. Avec notre mode de scrutin actuel, uninominal à un tour, la personne qui obtient le plus grand nombre de votes des électeurs est celle qui remporte le siège. En mai 2018, quatre chefs de partis ont signé une entente pour réformer le mode de scrutin au Québec. La Coalition Avenir Québec, le Parti Vert, le Parti Québécois et Québec Solidaire se sont engagés, sous le Mouvement Démocratie Nouvelle, à remplacer le mode de scrutin uninominal à un tour actuel par un scrutin proportionnel mixte compensatoire avec listes régionales.
Ce mode de scrutin se décline en deux facettes : 75 députés seraient élus pour 75 circonscriptions qui couvriraient tout le territoire. Cependant, les 50 députés restants seraient élus de façon proportionnelle, peu importe le nombre de sièges remportés par les partis dans les circonscriptions. Chaque parti dresserait des listes régionales de candidats et candidates de son parti qui serviraient à rééquilibrer le résultat final en fonction de la proportion nationale de votes obtenue pour le parti.
Le mode de scrutin en soi ne garantit pas la parité, c’est grâce à la volonté des partis qu’il sera possible de l’atteindre. Le GFPD propose la méthode de l’alternance des femmes et des hommes sur des listes fermées. Lorsqu’une telle règle est imposée, les partis doivent présenter des femmes et des hommes en alternance sur leur liste. Ainsi, si un parti obtient 20 sièges, la moitié d’entre eux seront occupés par des femmes. Il s’agit de la modalité qui assure le mieux une représentation paritaire. Elle est utilisée dans de nombreux pays tels que l’Allemagne, la Belgique, les pays nordiques, etc. Le GFPD exige aussi que la moitié des listes d’un parti débutent par une femme. Ces méthodes garantissent l’équivalence entre les hommes et les femmes au sein de la sphère politique.
Si les femmes sont sous-représentées en politique et dans les instances de décision, ce n’est pas parce qu’elles ne s’y intéressent pas, mais bien parce que des obstacles systémiques (organisation des partis politiques, contraintes familiales, domination symbolique exercée par les hommes, etc.) freinent leur accès, c’est donc grâce à ces mesures concrètes que les femmes pourront s’ouvrir officiellement à la politique.