Le mois de mars est un mois important pour la cause féministe, le 8 mars étant la Journée internationale des femmes. Beaucoup savent qu’il s’agit d’une journée pour dénoncer la discrimination, les inégalités et les violences vécues par les femmes, tout en soulignant le chemin parcouru [1]. Pourtant, peu connaissent l’origine de cette date importante du calendrier. Pour cette raison, ce texte expliquera comment le 8 mars est devenu la Journée internationale des femmes (JIF) pour ensuite exposer l’avancée de la condition féminine dans certains domaines au fil des ans.
L’origine de la Journée internationale des femmes [2]
D’abord, le premier événement à l’origine de cette journée dédiée aux femmes est la manifestation pour le droit de vote des femmes survenue le dernier dimanche du mois de février 1909 aux États-Unis. Puis, la JIF a été officiellement célébrée pour la première fois le 19 mars 1911 en Allemagne, en Autriche, au Danemark et en Suisse, où à la suite d’une résolution à Copenhague pour l’instauration d’une journée des femmes, des millions d’hommes et de femmes ont participé à des rassemblements. Après cette date, les femmes européennes tiennent des rassemblements au même moment de l’année en 1913 et 1914 pour protester contre la guerre et soutenir les autres femmes. Le 8 mars 1917, des femmes vivant en Russie manifestent pour du pain et le retour de leurs maris de la guerre. En guise de commémoration, le président Lénine consacre, en 1921, le 8 mars comme étant la Journée des femmes.
Des années après ces événements, l’Organisation des Nations Unies (ONU) adopte une résolution désignant le 8 mars « Journée internationale des femmes » et invite chaque pays à consacrer cette journée à la célébration des droits de la femme.
Éducation
Le monde universitaire n’a pas toujours été accessible aux femmes québécoises. En effet, l’université McGill a été la première université à autoriser les femmes à assister à des cours en 1884 [3]. Les universités francophones n’ont suivi le pas que longtemps après. Avant 1908, les universités francophones n’offrent pas de cours classiques aux femmes, si ce n’est que les cours de soir [4]. C’est ainsi que Marie Sirois a obtenu un certificat d’études littéraires en 1904, ce qui a fait d’elle la première femme diplômée de l’Université Laval [5]. Toutefois, bien que diplômée, elle n’a pas assisté à la cérémonie de remise de diplômes à la demande de la direction.
Quelques années plus tard, Annie Macleod devient la première femme à obtenir un Ph.D. à l’université McGill [6]. Puis en 1912, Carrie Derrick devient la première professeure titulaire au Canada, elle enseigne la génétique et l’évolution à l’université de McGill [7].
Les réalisations de ces pionnières ont eu de grandes répercussions dans la vie des femmes. Non seulement maintenant nous avons librement accès aux cours universitaires et au rang de professeures titulaires, mais les femmes sont dorénavant plus nombreuses sur les bancs des universités. En effet, 57,6 % des diplômes émis par l’Université Laval pour l’année 2017-2018 ont été remis à des femmes [8].
Les femmes dans le monde juridique
L’accès difficile aux études supérieures s’est également reflété dans le domaine du droit. La première femme qui a obtenu un diplôme en droit au Québec est Annie MacDonald Langstaff, diplômée de l’université McGill en 1914 [9]. Cependant, son admission au Barreau a été refusée, décision qui a été confirmée par la Cour supérieure puis par la Cour du Banc de la Reine [10]. Ainsi, cette femme n’a pu accéder à la profession d’avocat puisque les professions libérales étaient réservées aux hommes. De plus, l’article 28 du Règlement sur le Barreau du Québec prévoyait que « nul ne peut être admis à l’étude du droit à moins d’être sujet britannique et de sexe masculin » [11]. Ainsi, après sept modifications législatives, ce n’est qu’en 1942 qu’Elisabeth C. Monk réussit à s’inscrire au Tableau de l’Ordre du Québec, ce qui a fait d’elle la première femme avocate du Québec [12]. À l’époque, la situation était bien différente dans le reste du Canada puisque les femmes avaient accès à la profession d’avocat dès 1895 [13]. Par conséquent, Clara Brett Martin a été la première femme de l’Empire britannique à obtenir ce statut en étant admise au Barreau du Haut-Canada le 2 février 1897 [14].
Ces premières percées dans le domaine juridique ont mené à la nomination, en 1961, de la première juge du Québec ; Thérèse Lemay [15]. Puis, en 1979 Claire L’Heureux-Dubé a été la première femme à siéger à la Cour d’appel. Elle a également été la première femme québécoise nommée juge à la Cour Suprême du Canada en 1987, la première femme juge à cette Cour étant Bertha Wilson nommée cinq ans plus tôt [16].
La persévérance de ces femmes a fait en sorte qu’en 2014, le nombre de femmes admises au Barreau du Québec a surpassé pour la première fois le nombre d’hommes [17]. Bien qu’en 2011 il n’y avait que 20 % des associés de cabinets qui étaient des femmes [18], il y a espoir que ce chiffre augmentera. En effet, les femmes sont plus nombreuses dans la profession dans la tranche d’âge de 20-44 ans alors que ce sont les hommes qui sont plus nombreux pour les 45 ans et plus [19]. Par conséquent, il est possible de croire que lorsque les plus jeunes avocats auront atteint l’expérience nécessaire au partenariat, le nombre de femmes associées augmentera par le fait même.
En conclusion, l’instauration d’une journée des femmes prend tout son sens en regard de tous les progrès réalisés par les femmes au cours des dernières décennies, voire du dernier siècle. Que ce soit dans l’éducation ou dans le domaine du droit, les femmes ont fait leur place dans des milieux qui étaient autrefois réservés aux hommes. Toutefois, il est encore trop tôt pour déclarer que l’égalité des sexes est atteinte. En effet, en 2016, pour chaque dollar qu’un homme gagne, une femme en gagne en moyenne 89 cents [20]. L’équité salariale n’est donc pas encore atteinte au Québec. Cela étant dit, il y a espoir puisque lorsque nous analysons la disparité salariale hommes-femmes selon les tranches d’âges, plus les femmes sont jeunes, moins les inégalités sont grandes. Cela peut être attribuable au fait qu’aujourd’hui, les femmes sont plus nombreuses à accéder à des études supérieures, et par le fait même à de meilleurs emplois. Donc, serait-ce utopique de croire que, d’ici une ou deux décennies, l’égalité des sexes sera atteinte ?
[1] Conseil du statut de la femme, « L’origine « VÉRITABLE » du 8 mars Journée internationale des droits des femmes », Gouvernement du Québec, [En ligne], [https://www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/Dinf-Origine-8mars-FR.pdf] (1 mars 2019)
[2] Les informations contenues dans cette section proviennent du site Conseil du statut de la femme, « L’origine « VÉRITABLE » du 8 mars Journée internationale des droits des femmes », Gouvernement du Québec, [En ligne], [https://www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/Dinf-Origine-8mars-FR.pdf] (1 mars 2019) et Condition féminine Canada, « À propos de la Journée internationale des femmes », Gouvernement du Canada, [En ligne], [https://cfc-swc.gc.ca/commemoration/iwd-jif/about-apropos-fr.html] (1 mars 2019).
[3] Université McGill, « Défricheuses : les femmes de McGill », À propos de McGill, [En ligne], [https://www.mcgill.ca/about/fr/histoire/10-histoires-en-vedette/les-femmes-de-mcgill] (6 mars 2019)
[4] Jonathan Livernois et Alex Noël, « La lente intégration des femmes à l’université », LeDevoir, [En ligne], [https://www.ledevoir.com/societe/education/500927/la-lente-integration-des-femmes-a-l-universite] (6 mars 2019)
[5] Yvon Larose, « À la mémoire de la première femme diplômée de l’Université », Le journal de la communauté universitaire, [En ligne], [https://www.lefil.ulaval.ca/memoire-premiere-femme-diplomee-universite-24121/] (6 mars 2019)
[6] Supra, voir note 3.
[7] Ibid.
[8] Bureau du registraire, « Statistiques », Université Laval, [En ligne], [https://www.reg.ulaval.ca/files/content/sites/reg/files/files/4-Stats/ProfilULaval_Cy01.pdf] (6 mars 2019)
[9] Supra, voir note 3
[10] Emeline Magnier, « Le Barreau au féminin », Droit-Inc, [En ligne], [http://www.droit-inc.com/article12210-Le-Barreau-au-feminin] (7 mars 2019)
[11] Ibid.
[12] Ibid.
[13] Constance Backhouse, « MARTIN, CLARA BRETT », Dictionnaire biographique du Canada, [En ligne], [http://www.biographi.ca/fr/bio/martin_clara_brett_15F.html] (7 mars 2019)
[14] Ibid.
[15] Supra, voir note 10.
[16] Ibid. ET Gouvernement du Canada, « La Cour Suprême du Canada », [En ligne], [https://www.scc-csc.ca/court-cour/info/poster-affiche-fra.pdf] (7 mars 2019)
[17] Barreau du Québec, « BARREAU-MÈTRE 2015 LA PROFESSION EN CHIFFRES » Barreau du Québec, [En ligne], [https://www.barreau.qc.ca/media/1163/barreau-metre-2015.pdf] (7 mars 2019)
[18] Supra, voir note 10.
[19] Supra, voir note 17.
[20] Karl Rettino-Parazelli, « Le Québec se rapproche de l’équité salariale », LeDevoir, [En ligne], [https://www.ledevoir.com/societe/532671/le-quebec-se-rapproche-de-l-equite-salariale?fbclid=IwAR3URoFgeLtSoL6BXcsdTAoo6OlsX8S6VFvg0g8F43B2OaR57uGAs52SWrE] (8 mars 2019)